Léon DEYRON

 Le Maire qui a encouragé le massacre des algériens

                                                                                      Par Kamel MELLOUK  





Mais qui était donc Léon DEYRON ? Qui se cache derrière ce nom connu de beaucoup de souk-ahrassiens ? Pour une grande partie de nos concitoyens, il est ce fameux maire qui a énormément fait pour la ville de Souk Ahras. Il est ce célèbre auteur du modeste opuscule qui relate l’ « histoire » de notre chère ville depuis son occupation par l’armée française jusqu’à la fin de la deuxième guerre mondiale.
Mais ce que beaucoup d’entre nous ne connaissent pas de cet illustre colon est son passé extrêmement pro-coloniale et ses aigres positions politiques anti arabes.

Léon DEYRON est né le 20 février 1874 à Constantine. Il est arrivé à Souk Ahras vers la fin du 19 éme siècle pour s’y installer et travailler la terre. Il a reçu pour ça une aide considérable de l’administration coloniale. En effet, elle lui octroya généreusement plusieurs dizaines d’hectares de terre fertiles confisqués aux autochtones algériens après les fameuses insurrections des Kablouti et des hanancha.

Il entre en politique sous la houlette du parti radical pour devenir conseiller municipal, conseiller général de Souk-Ahras puis maire de cette ville.
Le 21 octobre 1945 il est élu représentant du département de Constantine à la première Assemblée nationale constituante où il fut nommé membre des commissions des moyens de communication et des PTT, des pensions civiles et militaires et des victimes de la guerre, et du ravitaillement.

Léon DEYRON qui faisait partie du groupe radical-socialiste, a été et de loin le plus représentatif du conservatisme de la place de Valois en matière coloniale.
Il avait voté contre toutes les lois qui donnaient des droits aux algériens.
A l’assemblée, il était avec Paul Cuttoli, le meilleur défenseur du régime de l’indigénat. Pour rappel ce régime de la honte donnait aux gouverneurs et aux administrateurs des colonies le pouvoir d’emprisonner en dehors de toute décision de justice, les indigènes « coupables de faits ou d’abstention de nature à porter atteinte au prestige des représentants de l’autorité coloniale ». Pire encore Léon DEYRON a combattu toute sa vie pour ôter à l’algérien sa qualité de justiciable devant les tribunaux français. C’est ainsi que beaucoup de souk-ahrassiens dont mon père MELLOUK Mnaouer, Chaffai TOURAB , Mohamed Chérif MESLEM, MELLOUK Mohamed Cherif, OULED ZAOUI Messaoud, HAMMADA Mohamed Saleh , HAMMADA Mohamed Chérif, NOURI Abdelkrim, RAFFA Abdelmajid et tant d’autres furent internés pour plusieurs années (1946 à 1949 ) à Djenen Bourezgue sur simple ordre de ce criminel d’édile.

Léon DEYRON, toujours fidèle à lui-même, hautain et dédaigneux a voté et sans surprise contre la loi n° 46-645 du 11 avril 1946 rapportée par Houphouët-Boigny et qui portait sur la suppression du travail forcé des indigènes.
DEYRON était aussi un des plus farouches défenseurs et cocardiers de la colonisation sauvage de l’Algérie. Il était vigoureusement contre la loi n°46-940 du 7 mai 1946 portant sur l’abandon du régime de double collège. Il a combattu jusqu’à sa mort contre l’institution du collège unique car il craignait que cette nouvelle loi donnerait aux algériens les mêmes droits que les français ce qui mettra selon lui en danger l’avenir de l’Algérie française.

Le 10 juillet 1945, Léon DEYRON toujours égal à lui-même, c'est-à-dire arrogant et méprisant vis-à-vis de tout ce qui était arabe et musulman,  justifie sans état d’âme la répression des émeutes du 08 mai 1945. Il explique les raisons de la perte de prestige de la France auprès des masses musulmanes, il condamne l'utilisation de l'Islam et de la langue arabe à des fins politiques et souhaite fermer toutes les écoles coraniques.
Avec le gouverneur Chataigneau, Léon DEYRON a été le meilleur avocat et défenseur du criminel de guerre André Achiary le sous-préfet de guelma qui avait ordonné le massacre des milliers de civils le 09 mai 1945.

En effet DEYRON avait soutenu sans ambages son ami André Achiary dans l’organisation d’une milice coloniale forte de plusieurs milliers d'hommes fortement armée d’armes automatiques, qui sévira dans la répression au cours des mois de mai et juin 1945 dans toute la région de Guelma et Souk Ahras.

C’est Léon DEYRON qui a organisé avec d’autres sanguinaire le Tribunal de Salut public qui, tous les jours, enverra à l'exécution cinquante à soixante musulmans algériens.

Bien que responsable de près de 15000 assassinats à Guelma et à Souk Ahras , André Achiary a été décoré en janvier 1946 de la Légion d'honneur, au titre de la Résistance, décoration demandée pour lui par l'Association du 8 novembre 1942 dont Léon DEYRON était membre important et influent.


Tel était le passé de celui que beaucoup de souk-ahrassiens croyaient à tort être un philanthrope et un bienfaiteur bien de chez nous.

Sources :

 
Biographies des députés de la IVe république
http://www.assemblee-nationale.fr

Sétif, mai 1945: massacres en Algérie
Par Roger Vétillard
Collaborateur Guy Pervillé
Publié par Editions de Paris, 2008

Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français
Par Jean Maitron, Claude Pennetier
Collaborateur Jean Maitron, Claude Pennetier
Publié par Éd. ouvrières, 1984

La Reconstruction du parti radical
Par Gilles Le Béguec,
Christian Biredent, Éric Duhamel,
Société d'histoire du radicalisme,
Université Paris-Val-de-Marne
, Centre national

La Guerre d'Algérie par les documents: L'avertissement, 1943-1946
Sous la direction de Jean-Charles Jauffret
Par Jean-Charles Jauffret, Armée de terre, France. Armée de terre. Service historique
Publié par Service historique de l'Armée de terre, 1990

Le guêpier
Claude Paillat
Publié 1969

La révolution nationale algérienne et le Parti communiste français
Par Jacques Jurquet
Publié par Éditions du centenaire, 1974